Compter sur la nature : c’est notre atout le plus puissant

ONU Développement
6 min readDec 19, 2022
Photo : Shutterstock

Nous faisons face à la sixième extinction de masse. Au cours des 50 dernières années, la nature s’est dégradée plus sérieusement qu’à tout autre moment de l’histoire de l’humanité, déstabilisant la planète entière. Jusqu’à un million d’espèces sont menacées sur Terre, et chaque jour, nous en perdons 200 autres.

Aujourd’hui, nous avons besoin de plus d’une Terre et demi (1,6) pour maintenir le mode de vie actuel de l’humanité.

Mais notre planète n’est pas une victime — sa fragilité est due au fait que ses ressources sont limitées. L’équilibre délicat des frontières planétaires nous offre un environnement où l’on peut survivre, et qui est tout à fait unique dans le vaste espace inhospitalier au-delà de notre atmosphère.

L’humanité paiera le prix le plus élevé pour la destruction de notre environnement. Nous dépendons fortement de la nature, non seulement pour notre survie, mais aussi pour préserver nos systèmes économiques mondiaux. On estime que 44 billions de dollars, soit environ la moitié du produit intérieur brut (PIB) mondial en 2019, dépendent de la nature pour l’ensemble des produits fournis, des médicaments à la nourriture.

La biodiversité procure des médicaments primaires à 4 milliards de personnes dans le monde ; l’agrobiodiversité améliore la vie d’un milliard de personnes sous-alimentées ; et la biodiversité des océans fournit à 4,3 milliards de personnes 15 % de leurs protéines annuelles.

Face aux menaces combinées et intégrées auxquelles l’humanité est confrontée en matière de destruction de la nature, de changement climatique, de pauvreté, d’inégalité et d’insécurité, les solutions trouvées dans la nature représentent un tiers de nos solutions climatiques (en anglais) les plus rentables.

Nous connaissons les faits. Pourquoi n’agissons-nous pas ?

Nous savons que la dégradation des écosystèmes pourrait déclencher une spirale descendante de 2,7 billions de dollars américains du produit intérieur brut mondial d’ici 2030.

Rien qu’un petit investissement dans la nature permet d’atténuer les effets de la sécheresse à Madagascar. Photos : PNUD Madagascar/Ramananjafy Randrianandrasana et Ramatoulaye Moussa Mazou

Certains craignent que la protection de l’environnement se fasse au détriment du progrès et des gains économiques. Pourtant, investir dans la nature peut rapporter de substantiels dividendes.

Les mangroves réduisent les inondations annuelles pour plus de 18 millions de personnes dans le monde, en protégeant 39 % de personnes supplémentaires contre les inondations annuelles et en prévenant des dommages estimés à 82 milliards de dollars par an.

La restauration de 350 millions d’hectares de forêts et de paysages générera environ 170 milliards de dollars américains par an d’avantages nets tirés de la protection des bassins versants, de l’amélioration des rendements agricoles et des produits forestiers, tout en séquestrant l’équivalent de 1,7 gigatonne de dioxyde de carbone par an.

La restauration des forêts est profitable car elle renforce leur capacité à stocker le carbone. Photo : Shutterstock

Des changements à grande échelle dans le secteur de l’alimentation, des infrastructures et de l’énergie pour protéger activement la nature pourraient créer 10 billions de valeurs commerciales annuelles et 395 millions d’emplois d’ici 2030. Les forêts fournissent à elles seules plus de 5 000 types de produits à base de bois, générant une valeur brute annuelle d’un peu plus de 600 milliards de dollars, soit moins de 1 % du PIB mondial (en anglais).

Investir pour et non contre la nature

Pendant ce temps, les subventions qui nuisent à la nature — notamment les subventions aux combustibles fossiles et aux engrais agricoles coûtent au monde entre 4 et 6 billions de dollars par an. La perte mondiale de tous les pollinisateurs (en anglais), notamment des abeilles et des papillons, peut entraîner une baisse de la production agricole annuelle d’environ 217 milliards de dollars américains.

L’entrepôt médical national de la Zambie, d’une superficie de 7 000 mètres carrés, profite des avantages de l’énergie solaire, avec le soutien du PNUD et du Système norvégien de préparation aux situations d’urgence. Les panneaux solaires refroidissent actuellement environ la moitié de l’entrepôt, fournissant une alimentation ininterrompue pour la réfrigération des médicaments et des vaccins vitaux. Photos : PNUD/ Karin Schermbrucker pour Slingshot

La suppression des subventions aux combustibles fossiles décourage également la consommation d’énergie fossile et réduit les émissions de carbone. Les fonds pourraient être dépensés pour des politiques en faveur des pauvres telles que les filets de sécurité sanitaire qui combattent les inégalités plutôt que de les perpétuer en soutenant les plus riches de la société.

En 2021, 700 milliards de dollars ont été dépensés en subventions explicites aux combustibles fossiles — ce même montant pourrait être utilisé pour combler le déficit financier afin de réaliser les objectifs du Cadre mondial de la biodiversité établis lors de la COP15, notamment l’objectif critique de 30x30 visant à protéger un tiers des terres et des océans de la Terre d’ici 2030.

Inclusion et responsabilisation des communautés en première ligne

Nelson Ole Reiyia a commencé à faire campagne pour la préservation de la réserve nationale Masai Mara lorsqu’il a commencé à voir de plus en plus de clôtures électriques apparaître dans le paysage. Photo : Nashulai Maasai Conservancy/Nora Nord

« La conservation peut fonctionner lorsque les personnes y participent, et non lorsqu’elles sont chassés », a déclaré Nelson Ole Reiyia, co-fondateur de la Nashulai Maasai Conservancy et lauréat du Prix Équateur.

Les peuples autochtones et les communautés locales sont essentiels pour garantir la mise en œuvre de tous les objectifs de biodiversité. Ensemble, ils gèrent près de 50 % des terres du monde. Une plus grande biodiversité est maintenue, de meilleurs résultats de conservation sont obtenus grâce à leur gestion de la biodiversité, et leurs résultats en matière de conservation sont plus efficaces que ceux des zones protégées par le gouvernement.

Pourtant, les peuples autochtones et les communautés locales ne détiennent des droits légaux que sur 10 % du territoire mondial (en anglais). Seuls 17 % du financement mondial pour le climat et la conservation destiné aux communautés autochtones et locales vont à des projets dirigés par des peuples autochtones. Les femmes autochtones reçoivent encore moins : environ 5 % du financement mondial total.

Des partenariats pour mieux protéger la nature

Le PNUD a lancé le UNDP Nature Pledge (la promesse climatique du PNUD pour la nature) dans le but de soutenir les communautés à tous les niveaux, notamment les peuples autochtones, avec un nouveau financement de 189 millions de dollars pour aider plus de 140 pays à travers le monde à atteindre et à mettre en œuvre leurs objectifs ambitieux en matière de nature et de biodiversité, comme le stipule le nouveau Cadre mondial pour la biodiversité.

Un petit jaguar, espèce considérée comme quasi menacée, au Mexique. Photo : PNUD Mexique

La contribution annoncée se base sur un portefeuille de la nature de 3,2 milliards de dollars distribué sur tous les continents, complété par un soutien sur le terrain pour placer la nature au cœur des opportunités économiques, en alignant les priorités de développement sur une planète prospère. Elle catalysera des changements : au niveau politique, économique et social en influençant la perception que nous avons de la nature et les récits que nous racontons à son sujet.

Grâce à l’Initiative pour la finance de la biodiversité du PNUD (BIONFI), le soutien dans plus de 40 pays corrige déjà, preuves à l’appui, notre perception de la nature qui devient un atout. Au Mexique, par exemple, un fonds national pour le climat qui n’était auparavant ni opérationnel ni axé sur la biodiversité, a vu son chiffre d’affaires dépasser 3 millions de dollars, dont 2 millions de dollars ont été réinvestis dans le renforcement de la résilience des écosystèmes.

Le récit qui suppose que le gain économique vaut le coût de nos actifs naturels appartient au siècle dernier. La perte de la nature coûte trop cher à l’humanité. Au lieu de cela, nous devons investir, protéger et gérer durablement l’atout le plus précieux de l’humanité. Nous comptons tous sur la nature pour un avenir florissant sur une planète saine.

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