La confiance, un ingrédient essentiel pour un relèvement réussi
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La conseillère SURGE Nermine Wally nous raconte sa mission au sein d’une équipe d’intervention en Haïti, au lendemain du séisme qui a frappé l’île en août 2021.
Écrit par Nermine Wally, Spécialiste de programme, PNUD
Tout s’est passé très vite. Je travaillais au siège du PNUD à New York lorsque j’ai reçu un appel de l’équipe mondiale de réponse aux crises du PNUD, qui prévoyait un déploiement en Haïti. L’île venait en effet d’être frappée par un séisme de magnitude 7.2. L’impact de ce séisme avait été dévastateur et le besoin était urgent de personnes sur le terrain pour mettre en place les interventions et lancer les activités de relèvement. On m’a demandé si je parlais français, j’ai confirmé que c’était le cas, et j’ai immédiatement été déployée sur place.
En tant que membre de l’équipe de conseillers du dispositif SURGE du PNUD, j’ai été formée pour être envoyée dans des situations de crise au lendemain de catastrophes. Le rôle de cette équipe de conseillers est d’apporter un appui immédiat et ciblé aux populations touchées dans des délais très courts.
Le temps était venu pour moi de mettre ma formation en pratique.
Quand la crise frappe — deux fois
L’impact du séisme en Haïti a été exacerbé par l’ouragan Grace, qui a frappé l’île deux jours plus tard. Ces deux catastrophes naturelles ont causé la mort d’environ 2 300 personnes, et plus de 10 000 personnes ont été blessées. Près de 1,2 million de personnes, dont plus d’un demi-million d’enfants, avaient cruellement besoin d’une aide humanitaire d’urgence. Le séisme a détruit des habitations, des hôpitaux et des écoles, et des routes ont été coupées, empêchant les populations de trouver un refuge et les autorités de leur fournir une protection.
Quand une crise éclate, les actions humanitaires classiques consistent à fournir de la nourriture, des kits sanitaires et un refuge temporaire aux populations pour atténuer leur souffrance. L’équipe SURGE du PNUD vient compléter ces efforts essentiels en recalibrant les capacités locales et en coopérant avec la population et les acteurs locaux pour pérenniser la prestation des services, en vue du départ des travailleurs humanitaires.
Ma mission était d’aider la direction du Bureau de pays à coordonner les initiatives de relèvement dirigées par le PNUD. Avec l’aide d’une équipe d’experts, j’ai élaboré un plan visant à mobiliser des capacités et des ressources additionnelles pour le relèvement et la réhabilitation d’Haïti. Plus concrètement, j’ai été chargée de recruter du personnel supplémentaire pour mener des actions sectorielles en Haïti, notamment des ingénieurs et des experts du relèvement et des moyens de subsistance, ainsi que d’affecter des ressources pour soutenir la mission du Coordonnateur résident et du Coordonnateur humanitaire. L’objectif était d’aider le Gouvernement haïtien à mettre en place un relèvement qui bénéficie de la pleine adhésion du pays.
Lespwa fè viv, ou la résilience d’Haïti
Haïti est un pays magnifique dont la longue lutte pour l’émancipation et l’autodétermination est une source d’inspiration et ne peut être séparée du travail que nous effectuons en tant que professionnels du développement.
Il s’agit d’une république formée et dirigée par des leaders noirs qui se sont soulevés contre l’institution de l’esclavage à une époque où d’autres nations continuaient d’être soumises à la domination coloniale. À la fin du XVIIIe siècle, alors que les Haïtiens se révoltaient pour revendiquer leur liberté, mon pays, l’Égypte, était envahi par Napoléon Bonaparte.
Si cela révèle quelque chose, c’est le niveau de conscience, de courage et de résilience des Haïtiens, que traduit le proverbe lespwa fè viv.
Pour moi, la riche bien que difficile histoire du pays indique le niveau de conscience, de courage et de résilience des Haïtiens. Cela me donne l’espoir que, malgré les immenses défis, les Haïtiens peuvent surmonter ce dernier coup et en sortir plus forts et mieux préparés pour le prochain.
Destination : Grand Sud
À l’arrivée de l’équipe du dispositif SURGE, nous avons embarqué dans un avion affrété par l’ONU qui nous a emmenés de Port-au-Prince à la capitale de Grand’Anse, Jérémie. En trois jours, nous avons pu nous rendre dans les trois départements et auprès des huit communautés qui avaient été les plus durement frappés par le séisme.
Les traumatismes accumulés au fil des catastrophes qui se sont succédées constituaient l’une des principales difficultés pour les populations. Les enfants et leurs parents ne voulaient pas rester dans des structures fermées, car ils ne s’y sentaient pas en sécurité. L’une des choses qui m’ont particulièrement touchée lorsque j’ai parlé avec des habitants qui avaient perdu leur maison a été leur volonté de se relever et de récupérer leur vie malgré toutes les difficultés qu’ils avaient dû surmonter. Ils étaient nombreux à avoir déjà commencé à réparer ou reconstruire leur maison.
Nous savions que le logement faisait partie des secteurs dans lesquels l’appui du PNUD pourrait avoir le plus grand impact. Nous avons coopéré avec des organismes de l’ONU et d’autres partenaires de développement pour veiller à ce que les auto-réparations soient effectuées correctement avec l’aide d’experts locaux, en tirant les enseignements de la gestion des répercussions du séisme de 2010 et de l’ouragan de 2016.
Amélioration progressive
À Pestel, une commune reculée de 87 000 habitants, les routes avaient été détruites et plus de 80 % de la population avait été durement frappée par le séisme. Il avait été difficile d’acheminer sur place de la nourriture et des biens de première nécessité. Les intervenants étaient bien équipés pour atteindre ces régions reculées et pour contribuer à répondre aux besoins les plus urgents.
Au lendemain du séisme, le PNUD s’est associé à la Direction de la protection civile d’Haïti (DGPC) pour venir en aide à environ 23 000 ménages dans des villes telles que Les Cayes, Jérémie, Corail, Anse-à-Veau, l’Asile et Miragoâne. Le PNUD a également livré environ 22 tonnes d’équipement à des organisations humanitaires.
« Dans cette situation difficile, le bureau de pays a pu compter sur l’équipe du dispositif SURGE juste après le séisme dans le département du Sud », a expliqué le Représentant résident du PNUD en Haïti, Fernando Hiraldo.
L’évaluation des besoins après une catastrophe constitue un autre volet important de la gestion d’une crise. En évaluant les dégâts économiques et physiques, elle permet au gouvernement de classer par ordre de priorité les besoins en matière de relèvement et d’établir un plan pour répondre au mieux à ces besoins. Le bureau du PNUD en Haïti et les conseillers du dispositif SURGE ont coopéré avec d’autres partenaires sur le terrain afin d’effectuer cette évaluation en six semaines.
L’ingrédient essentiel
Le plan SURGE identifie les étapes pratiques et les ressources nécessaires à la mise en œuvre d’un programme de relèvement à grande échelle en Haïti, qui vise à s’appuyer sur les acquis de développement antérieurs. Il identifie les moyens de subsistance, le logement et la gouvernance comme des domaines prioritaires pour le redressement immédiat et le renforcement de la résilience à long terme.
Au cours de mon déploiement en Haïti, j’ai appris qu’il était indispensable d’instaurer un climat de confiance pour réussir un relèvement. Le PNUD a noué des relations de confiance au cours des quinze dernières années grâce à son travail sur le terrain avec les populations locales.
Je me sens privilégiée d’avoir servi Haïti au sein de l’équipe SURGE du PNUD et d’avoir rencontré une population si résiliente, créative et aimant la vie.