La violence à l’égard des femmes nuit à chacun d’entre nous
Parfois, il suffit d’un pas pour amorcer le changement. Littéralement.
Comme le professeur de danse Chado Namgyel, membre fondateur du Studio Gokab au Bhoutan, qui a changé ses méthodes d’enseignement après avoir compris que les normes sociales néfastes qu’il n’avait jamais remises en question limitaient ses élèves de sexe féminin.
« Je n’encourageais pas les filles dans ce studio à apprendre tous ces mouvements dynamiques, pensant qu’elles étaient plus faibles que les garçons, et je ne me sentais pas à l’aise avec les garçons qui pratiquaient des formes de danse de type féminin », dit-il. « Cependant, maintenant, je respecte les individus. Maintenant, nous sommes ouverts à ce que tout le monde fasse ce qui l’intéresse ».
Ou comme le mari en Ouganda qui, ayant abusé de sa femme pendant 25 ans, accumulé les ressources du ménage et lui ayant caché de l’argent, est rentré chez lui, s’est mis à genoux et lui a demandé pardon après avoir participé à un programme qui expliquait que la violence sexiste n’est pas « normale ».
Une fois par an, la communauté internationale met en lumière la violence à l’égard des femmes et des filles à travers la campagne des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre. Mais pour de trop nombreuses femmes, la violence est une réalité de la vie quotidienne 365 jours par an.
Et c’est profondément nuisible, non seulement pour elles, mais aussi pour les personnes et les communautés qui les entourent.
« J’aimerais que chacun considère la violence à l’égard des femmes comme une épidémie silencieuse qui dévore d’abord les femmes et les filles, sinon le monde entier », dit Tina Musuya, directrice exécutive du Centre ougandais pour la prévention de la violence domestique qui, depuis 16 ans, se bat pour réduire les taux de violence en Ouganda et remettre en question les normes culturelles s’en rendent en partie responsables.
Aucune société n’est épargnée par la violence basée sur le genre : cette violence, qui touche environ une femme sur trois, a été aggravée par la COVID-19, accouchant d’une redoutable « pandémie de l’ombre ».
Le PNUD a intensifié ses efforts pour aider plus de 80 pays à lutter contre l’augmentation de la violence sexiste, dont les 26 pays de l’initiative Spotlight, un partenariat entre l’Union européenne et les Nations Unies visant à éliminer toutes les formes de violence envers les femmes et les filles. Au Yémen, le PNUD a lancé une application mobile qui recense les services de protection et d’aide et fournit des conseils aux survivants de la violence sexiste. Au Malawi, le PNUD a permis d’identifier et d’accélérer les poursuites en cas de violences sexuelles et sexistes grâce à des tribunaux mobiles dans les zones reculées.
Cette année, le thème des 16 jours d’activisme, « Orangez le monde : mettre fin dès maintenant à la violence à l’égard des femmes ! », est soutenu par la campagne « Tous UNIS » du Secrétaire général, qui vise à accroître la sensibilisation et à favoriser le changement.
La violence sexiste n’est pas seulement un fléau mondial, c’est aussi un obstacle majeur à la réalisation des objectifs de développement durable.
« Tout comme les impacts négatifs de la violence sexiste touchent la santé, les moyens de subsistance et même le changement climatique, les impacts positifs de la réduction de la violence sexiste permettent de progresser vers de multiples objectifs mondiaux », explique Jessica Zimerman, spécialiste de projet, violence sexiste, PNUD. « Les différents secteurs de développement ont chacun un rôle important à jouer pour mettre fin à l’une des violations des droits de l’homme les plus répandues dans le monde ».
C’est pourquoi, avec la République de Corée, le PNUD s’efforce d’aborder un problème ancien avec des idées neuves. Le programme « Mettre fin à la violence sexiste et réaliser les ODD » (2018–2022) teste de nouvelles approches dans sept pays pour réduire la violence sexiste et accélérer les progrès vers d’autres objectifs de développement.
« Les preuves démontrent que la violence sexiste est non seulement évitable, mais que sa prévention est un élément crucial pour progresser dans tous les autres aspects de la vie », déclare Diego Antoni, spécialiste des politiques en matière de genre, de gouvernance et de relèvement au PNUD.
Dans le cadre du projet, le PNUD Ouganda change le statu quo en introduisant la prévention de la violence sexiste dans des domaines non traditionnels tels que la restauration des zones humides et examine comment elle est liée aux facteurs de stress économique résultant du changement climatique.
Le PNUD s’est associé à la Commission nationale pour les femmes et les enfants du Bhoutan et a commencé à travailler avec des adolescents pour promouvoir des relations saines et des attitudes équitables entre les sexes. Le projet, qui a été étendu à trois autres écoles, n’a pas seulement changé la vie des jeunes concernés, mais aussi celle de leurs animateurs.
Avant de commencer à travailler avec les jeunes, Chado Namgyel pensait que les femmes étaient « heureuses » de faire toute la cuisine et le ménage, et qu’il n’était pas naturel pour les garçons de porter du rose.
Aujourd’hui, il considère ces idées comme des constructions qui privent les femmes — et les hommes — de leurs droits et de leurs libertés. Et surtout, il voit que ces préjugés et ces discriminations peuvent, et doivent, être changés.
« Si nous plaçons nos adolescents dans un environnement [discriminatoire], je pense qu’il y aura de la violence parce qu’il n’y a pas d’égalité, et s’il n’y a pas d’égalité, nous ne pouvons pas avoir de sociétés heureuses ou saines », dit-il.
L’égalité et les droits des femmes sont au cœur des objectifs de développement durable. La violence sexiste encourage les cycles intergénérationnels de violence, sape le tissu social et affaiblit gravement les capacités des communautés à rebondir après des chocs. Elle coûte non seulement aux individus, mais aussi à la justice, à la santé et aux services sociaux. Selon une étude de 2016, le coût annuel de la violence à l’égard des femmes pourrait s’élever à environ deux pour cent du PIB mondial, soit l’équivalent de 1 500 milliards de dollars américains.
Tina Musuya, du Centre ougandais pour la prévention de la violence domestique, est convaincue qu’un travail de genre véritablement transformateur a le potentiel de permettre aux femmes et aux filles de mener une vie dans la dignité, sans violence.
Au bénéfice de tous.
« Si vous voulez profiter de la vie… vous devez utiliser votre pouvoir avec les autres. Je crois que c’est ainsi que l’on se sent en sécurité, que le monde a un sens et que l’on aime vivre avec les autres ».