« Mon espoir pour l’action climatique est que les dirigeants mondiaux tiennent leurs promesses »

ONU Développement
7 min readNov 10, 2022

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Une jeune leader ougandaise livre ses réflexions sur ce que signifie façonner l’avenir climatique que nous voulons.

La jeune leader activiste ougandaise, JulietGrace Luwedde, souhaite que les jeunes prennent conscience des enjeux de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP27). Photo : Philip Mwebaza

JulietGrace Luwedde est une jeune leader activiste pour le climat en Ouganda, pays également connu sous le nom de « perle de l’Afrique ». Elle aime passer du temps en plein air, faire de l’escalade en montagne ou du cyclisme. Mais au-delà de ses passe-temps, cette enthousiaste de l’environnement a un programme chargé qui la mène bien au-delà des frontières de son pays.

JulietGrace porte de nombreuses casquettes. Agissant comme Point focal au niveau global pour le Caucus des jeunes de la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification (CCNUCD), elle est également coordonnatrice régionale de l’Initiative de la jeunesse africaine sur les changements climatiques en Afrique de l’Est (AYICC) et membre du Conseil consultatif pour le projet Genre, génération et changement climatique (GENERATE) (en anglais) de l’Université de Leeds, qui s’intéresse aux villes d’Ouganda et d’Indonésie. Elle a récemment accédé aux fonctions de directrice des programmes de l’Organisation des jeunes de l’Afrique verte au sein de leur bureau en Ouganda et a lancé un Café des arts créatifs sur le climat à Kampala, un nouvel espace qui vise à étudier les problèmes sociaux et climatiques actuels tout en faisant participer les jeunes.

Nous nous sommes entretenus avec elle sur l’action en faveur du climat et sur ses espoirs concernant la COP27 qui se tient en Égypte.

JulietGrace porte de nombreuses casquettes et intervient auprès d’organisations axées sur la jeunesse, le climat, la désertification et le genre. Photos : Philip Mwebaza

Y a-t-il un moment particulier dans votre vie qui vous a donné l’envie de vous engager en faveur de l’action climatique ?

Mon travail dans ce domaine a commencé tôt, lorsque je faisais du bénévolat dans une organisation appelée « TEENS Uganda ». À ce moment-là, nous dispensions des formations à la culture potagère à l’intention des femmes pour leur permettre de cultiver leurs propres aliments et générer un revenu. J’ai été très touchée par ces femmes, et ceci m’a poussé à continuer. J’ai même lancé un projet semblable dans mon école, car j’ai réalisé que l’agriculture fonctionnait non seulement sur de grandes superficies, mais aussi dans des espaces délaissés autour de nos maisons : les petits espaces peuvent aussi y contribuer !

J’ai également pris conscience du fait que la nourriture n’est pas accessible à tous, même dans un pays comme l’Ouganda, qui est considéré comme le grenier alimentaire de l’Afrique, en particulier lorsque des événements climatiques se produisent et détruisent les récoltes. Et plus je grandissais, plus je comprenais le sens de tout cela.

JulietGrace a lancé un Café des arts créatifs sur le climat à Kampala, un nouvel espace qui vise à étudier les problèmes sociaux et climatiques actuels tout en faisant participer les jeunes. Photos : Philip Mwebaza

Comment l’Ouganda, votre pays natal, est-il affecté par le changement climatique ?

De mon point de vue, je dirais que l’agriculture est le secteur le plus touché par le changement climatique. Les changements dans la pluviométrie sont très apparents maintenant. Par exemple, le démarrage de la campagne agricole cette année a été retardé par l’arrivée tardive des pluies, tandis que l’an dernier, des pluies tardives et une saison sèche prolongée ont contribué à la propagation d’une invasion des criquets à travers l’Afrique de l’Est, qui a eu un énorme impact sur les cultures et les agriculteurs, particulièrement dans le nord de l’Ouganda où les personnes sont encore confrontées à une pénurie alimentaire.

Actuellement, les communautés vivant dans la partie Est de l’Ouganda sont en train de subir de graves inondations, suite aux débordements de deux rivières sorties de leur lit après d’abondantes pluies qui ont balayé la ville de Mbale, submergeant les habitations, les boutiques, les routes, et arrachant les canalisations d’eau.

La gestion des déchets est encore un autre défi dans les villes, où ceux-ci se retrouvent souvent dans les systèmes d’évacuation des eaux, créant des inondations dans certaines régions. Cela me fait penser que certaines de nos interventions ne sont pas durables en quelque sorte, et que nous devons nous assurer que nos efforts visant à réduire les risques de catastrophe mettent l’accent sur notre préparation face aux défis à venir.

Selon JulietGrace, les effets du changement climatique sont très apparents en Ouganda, pays également connu sous le nom de « perle de l’Afrique » pour son incroyable biodiversité et sa beauté naturelle époustouflante. Photos : Philip Mwebaza

Qu’est-ce qui vous préoccupe le plus alors que nous faisons face à la crise climatique ?

J’ai l’impression qu’au-delà des mots, il y a encore trop peu d’actions concrètes qui sont prises.

Lorsque l’on parle de solutions innovantes pour la gestion des déchets, sommes-nous seulement capables de les mener à bien ? Par exemple, quelle est l’efficacité des politiques consistant à interdire les sacs en plastique à usage unique adoptées au cours des dix dernières années en Afrique ? Les sacs en plastique sont encore utilisés partout. On ne peut pas parler d’une mise en œuvre efficace, là il le faudrait.

Je pense également que nous ne disposons pas de suffisamment de temps. Dernièrement, alors que des feux de forêt éclataient dans de nombreux endroits et que les petites îles continuaient de s’enfoncer dans la mer, j’ai réalisé que nous avions passé plus de temps à en parler qu’à intervenir.

Il peut être difficile de garder espoir, au vu de toutes les mauvaises nouvelles qui nous parviennent. Qu’est-ce qui vous fait vous sentir optimiste au sujet de l’action climatique ?

Mon optimisme provient du fait que les personnes sont maintenant conscientes de la réalité du changement climatique, ce qui est un point de départ de l’action en faveur du climat. Je suis également heureuse de constater que les discussions sur le climat ne se passent plus de manière compartimentée. Par exemple, les lois relatives au changement climatique portent sur des questions d’actualité plus générales telles que les migrations, alors que les personnes migrent à l’intérieur des pays du fait des défis environnementaux et des catastrophes climatiques telles que les inondations. Et le fait que les politiques climatiques traitent de ces questions est ce qui me permet de rester optimiste.

Je garde aussi espoir parce qu’en tant que pays, nous sommes dorénavant résolus à appliquer les politiques que nous élaborons. En Ouganda, nous avons maintenant une Loi sur le changement climatique, et le gouvernement est en train de mettre en place les réglementations correspondantes. Nous devons seulement nous assurer qu’elle soit appliquée.

Vous avez récemment organisé un Café des arts créatifs sur le climat en Ouganda. Pouvez-vous nous dire en quoi il consiste et quels types de résultats vous avez obtenus ?

L’idée du Café des arts créatifs sur le climat était de rassembler des esprits créatifs — des écrivains, des poètes, des peintres, des photographes et des enfants — à Kampala afin d’interpréter ou de vulgariser les discours sur le climat et de réfléchir ensemble à la façon de raconter les histoires de réussite concernant les changements qui se produisent. Un responsable du gouvernement nous a également rejoints pour étudier les collaborations possibles afin de mieux faire connaître leur travail sur le climat, et c’est là l’un des principaux résultats du Café des arts créatifs, à savoir la prise de conscience que les discussions sur le changement climatique doivent avoir lieu en dehors des salles de conférence.

La collaboration avec les enfants est également stimulante, car l’éducation sur les questions relatives au changement climatique est un moyen de les autonomiser, sachant qu’ils sont ceux qui seront les plus touchés par ces problèmes.

Le Café des arts créatifs sur le climat rassemble des esprits créatifs — des écrivains, des poètes, des peintres, des photographes et des enfants — qui souhaitent que les discussions sur le changement climatique se prolongent en dehors des salles de conférence. Photos : Philip Mwebaza

À votre sens, que peut apporter l’art à l’action climatique ?

L’art peut aider les personnes à faire des liens avec un sujet comme le changement climatique.

Il donne également la possibilité aux gens d’avoir une idée plus large de ce qu’il est possible de faire pour changer une situation lorsqu’ils la voient illustrée. Aussi, c’est un bon moyen de montrer comment le changement est en train de se produire.

La photographie peut aider les personnes à réaliser dans quel cadre elles vivent et les changements qui doivent se produire, et lorsqu’on compare deux séries d’images, les unes prises avant et les autres après une opération de nettoyage, par exemple, les personnes peuvent se rendre compte de ce changement et partager leur opinion. Donc, pour moi l’art provoque non seulement des discussions, mais aussi des actions.

Quels sont les espoirs que vous nourrissez à propos de la COP27 ?

Je m’efforce de faire en sorte qu’autant de jeunes que possible parlent de la COP27 en Ouganda, mon espoir étant qu’ils comprennent ce qui est en jeu, et les résultats auxquels s’attendre, notamment sur le plan du financement climatique et des engagements associés.

Le meilleur cas de figure pour moi serait que les engagements pris à la Conférence des Parties, où tous les dirigeants du monde se rassemblent, soient tenus.

Si vous avez apprécié la lecture de cet entretien, consultez d’autres témoignages de jeunes de l’Afrique sur le climat ainsi que notre dernière publication intitulée « Viser plus haut : améliorer l’engagement des jeunes pour l’action en faveur du climat » (en anglais).

Vous pouvez également en savoir plus sur le travail de la Promesse climatique du PNUD sur l’inclusion ici.

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